Du sacre des rois de France

Partie 2 : des Robertiens et capétiens

Le dernier article traitait des origines du sacre jusqu’aux Carolingiens. Effectivement la famille des Robertiens comme celle des Pippinides en son temps est alors la plus puissante des dynasties du royaume des Francs.
Louis « le Bègue » ne règnera que deux ans, en laissant deux fils en bas-âge, ce qui amène Charles « le Gros » à assurer le gouvernement du royaume, mais à sa mort, le fils survivant Charles, n’a que neuf ans. 

  • Des Robertiens 

C’est à Eude, fils de Robert « le Fort », Marquis de Neustrie, qui avait vaillamment combattu les envahisseurs, qu’incombe alors la tâche de régner. 
Il est proclamé roi, par les Grands à Compiègne par l’archevêque de Sens, chose qui déplut à l’archevêque de Reims, Foulques, qui se chargea de l’éducation du prince carolingien Charles. 
À la majorité de ce dernier, il réunit les Grands « légitimistes » & sacra Charles III à Reims, cela mena à une véritable guerre civile, qui prit fin avec un compromis. 
Charles III monta enfin sur le trône à la mort d’Eudes en 898. 

– Couronnement du roi Eudes des Grandes Chroniques de France, enluminure, auteur inconnu, entre 1275 & 1280, Bibliothèque Sainte-Geneviève. 

Mais, Charles III le simple (à ne pas confondre avec Charles III le gros) ne se montra pas à la hauteur de la tâche, face aux nombreuses difficultés que traversait le royaume. Il se mit à dos la haute noblesse franque et ira jusqu’à s’allier avec un païen, le pacte est rompu. 
Il est déposé & remplacé par Robert Ier, frère d’Eudes en 922. 
Robert meurt un an plus tard, dans une bataille contre les partisans de Charles, les Grands n’y voient pas un jugement de Dieu & élisent son gendre, Raoul de Bourgogne. 
À la mort de celui-ci en 936, le seul Robertien capable de prendre le pouvoir, est Hugues « le Grand », mais celui-ci ne souhaitant pas la couronne royale, rappelle le fils du Carolingien déchu, Louis IV« d’Outre-Mer ». 

Lorsque Louis meurt en 954, il laisse un fils âgé de treize ans, Lothaire ; Hugues le Grand meurt deux années plus tard, ce qui lui laisse les mains libres au jeune carolingien pendant quelques temps. 
Mais sa politique s’aliène le soutien de l’archevêque de Reims, Adalbéron. Lothaire meurt en 986 laissant la place à son fils Louis V.
Ce dernier convoqua une assemblée à Senlis, pour juger Adalbéron pour trahison, mais il meurt accidentellement & sans enfant en 987.

  • Des Capétiens 

La question de la succession se posa & tout naturellement, ce fut le duc des Francs, Hugues qui présida les débats ; sans surprise, il fut élu roi sur proposition d’Adalbéron. 
Un autre candidat s’était présenté, Charles de Basse-Lotharingie, mais il avait exaspéré les nobles & les prélats & avait été chassé de la cour par Lothaire, ce qui le disqualifia. 

Hugues Capet, pour assurer sa dynastie, prit soin comme les Carolingiens, d’associer son fils au pouvoir, en le faisant sacrer la même année ; cette politique se poursuivit pendant sept générations, jusqu’à Philippe II Auguste. 

Hugues Capet se trouva roi, mais ne fut que le seigneur de son domaine en propre ; les principautés des Grands firent de leur maître respectif, les premiers pairs de France. 

– Couronnement d’Hugues Capet d’un manuscrit, auteur inconnu, XIIIe ou XIVe siècle, département des Manuscrits de la Bibliothèque nationale de France.

À la fidélité jurée au roi sous les Carolingiens, succède l’hommage vassalique, en contrepartie d’un bénéfice. 
Louis VI réussira à imposer sa volonté, en bataillant contre les barons perturbateurs & par l’obligation de l’hommage des grands feudataires, car le roi ne tient de personne & est l’ultime maillon vers lequel convergent les chaînes des hommages. En 1143, Louis VII déclare dans le préambule d’un de ses diplômes : « Nous savons que, conformément aux prescriptions de l’Ancien Testament &, de nos jours, à la loi de l’Église, seuls les rois & les prêtres sont consacrés par l’onction de saint chrême. Il convient que ceux qui, seuls entre tous, unis entre eux par le chrême sacro-saint, sont placés à la tête du peuple de Dieu, procurent à leurs sujets les biens temporels comme les spirituels, & se les procurent les uns aux autres. » 
Ce qui affirme le parallèle entre le sacre & la consécration épiscopale. 
Charles V réforma l’Ordo, en faisant que le roi se dépouille de ses vêtements profanes, pour endosser des vêtements au caractère sacerdotal : « Quand le roi se dépouille, c’est signifiance qu’il abandonne l’état mondain de par-devant pour prendre celui de la religion royale. » La Chanson de Roland fait de Charlemagne un roi-prêtre, donnant l’absolution & levant sa dextre pour bénir ses troupes, ce dont Philippe II Auguste s’inspirera lors de la bataille de Bouvines. 

Jean Gerson, chancelier de l’université de Paris qualifie le roi « de très chrétien, roi par miracle consacré, roi spirituel & sacerdotal. » Pour Jean Jouvenel des Ursins, le roi devient « grâce » au sacre. Cela marque la sublimation de la dignité royale. 
Par la Sainte-Ampoule & par le toucher des écrouelles, les rois deviennent de saint prélat laïc. Les armes de France, représentent des fleurs de lys, fleur mariale & symbole de pureté. 
Les lys d’or, couleur du soleil, sur l’azur couleur du ciel, illustrent le rapport direct entre Dieu & le roi ainsi que son royaume. 

Tant de lien entre le roi & le ciel, firent des rois de France, les lieutenants de Dieu sur Terre. 

– Couronnement de Louis VI à Orléans des Grandes Chroniques de France, enluminure, Jean Fouquet, département des Manuscrits de la Bibliothèque nationale de France.

ouvrage conseillé : – Dᴇᴍᴏᴜʏ, Philippe, Le Sacre du Roi, La Nuée Bleue / Édition du Quotidien, Strasbourg, 2016.

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